Oiseau/Cheval, Lapin/Chien: une connotation sexuelle des
animaux dans L’Immoraliste d’André Gide
(Bird/Horse, Rabbit/Dog: A sexual connotation of animals in
The Immoralist by André Gide)
Piriyadit Manit
Chulalongkorn University, Bangkok, Thailand
e-mail: piriyadit.m@gmail.com
AGATHOS, Volume 15, Issue 1 (28): 71-86
© www.agathos-international-review.com CC BY NC 2024
Abstract: In André Gide’s The Immoralist, four animals, namely bird, horse, rabbit and dog, appear with striking frequency. A semiotic reading shows that each of the four animals in question has a sexual connotation and this connotation is revealed by the fact that, being interdependent, the bird, the horse, the rabbit and the dog are systematically arranged with each other, in such a way so as to constitute a relationship of differential values, a structure of oppositions and contradictions. The bird is opposed to the horse: the first animal connotes conjugal relationship, father, wind, and death while the second signifies homosexuality, mother, water, and life. The rabbit, negation of the bird, is opposed to the dog, negation of the horse: contrary to the dog which is associated with prostitution, non-mother, fire, non-life, the rabbit is linked with incest, non-father, earth, non-death. The discovery of the structure of the symbolic values of the four animals makes it possible to observe the dynamism of Michel’s sexual life: this life begins with Christian marriage and ends with prostitution, and in this course of sensuality, the protagonist moves away from humanity and gradually becomes inhuman, that is to say immoralist.
Keywords: André Gide, L’Immoraliste, animal in French literature, semiotic reading, sexual connotation
Introduction
Dans Les animaux dans la Littérature Française, les deux auteurs écrivent:
« Les Français sont probablement le peuple qui a étudié avec le plus de soin l’animal pour lui-même, et l’a rapproché le plus de l’homme par les prestiges de l’art. Le Bestiaire de la littérature française, si on se donnait la peine de l’établir avec exactitude, constituerait l’hommage le plus complet et le plus pertinent qui ait été rendu aux animaux. » (Calvet et Cruppi 1956, 2)
Cela est vrai dans L’Immoraliste d’André Gide, notamment en ce qui concerne le rapprochement entre animal et homme par l’art. En effet, force est de constater que Gide tend à décrire et caractériser ses personnages en les assimilant aux animaux. À titre d’exemple, Bachir lèche sa blessure et « sa langue était rose comme celle d’un chat » (I, 2 p. 607[1]). Ménalque va et vient « à la façon d’un fauve en cage » et il prétend: « j’abandonne au loin mon passé comme l’oiseau, pour s’envoler, quitte son ombre. » (II, 2 p. 657). Michel, quant à lui, est tellement envahi par un calme à Biskra que « j’en aurais crié, si j’avais pu crier comme les bêtes » (I, 5 p. 620). De même, notre protagoniste affirme s’appliquer à « vivre, comme fait l’animal et l’enfant » (I, 6 p.620). L’imagination de l’immoraliste, qui apprend le secret chez Heurtevent, tournoie « comme une mouche à viande » (II, 3 p. 666). En prenant plaisir au braconnage nocturne, Michel se fait « des yeux d’oiseau de nuit » (II, 3 p. 669).
Parmi les animaux qui s’observent dans ce roman, quatre apparaissent avec une fréquence frappante: oiseau, cheval, lapin, chien. La présente étude propose une lecture sémiotique de L’Immoraliste, ayant pour but de montrer que chacun des quatre animaux en question a une connotation sexuelle, étroitement liée en particulier à la vie sensuelle de Michel, et que cette connotation se décèle du fait que, interdépendants, l’oiseau, le cheval, le lapin et le chien s’organisent systématiquement, de telle façon à constituer un rapport des valeurs différentielles, une structure d’oppositions et de contradictions.
À propos des travaux qui nous précèdent, à notre connaissance, un seul aborde un sujet proche du nôtre: « Les Images de la nature dans l’Immoraliste » d’Hippolytus Dority et Réal Ouellet (1969), travail auquel nous devons énormément. Les deux auteurs traitent de symbole sexuel les éléments de nature tels l’arbuste, ainsi que les animaux comme l’anguille. Pourtant, les quatre animaux qui relèvent de l’objet de notre recherche n’y sont malheureusement pas passés au crible.
Ainsi, nous étudierons d’abord les quatre animaux qui forment entre eux deux couples d’opposition: oiseau/cheval et lapin/chien. Ensuite, nous explorerons un rapport étroit entre la structuration des connotations des quatre animaux et le dynamisme sexuel chez Michel.
Oiseau/Cheval
Animal aérien, l’oiseau est associé au ciel, lequel, écrit avec la majuscule, désigne l’espace de Dieu, le Père de l’univers. De cette manière, l’oiseau connote un rapport sexuel légitime, sacré, une promesse conclue devant le père, c’est-à-dire une relation conjugale, hétérosexuelle. C’est au nom du père que Michel se marie avec Marceline, et non pour l’amour à l’égard de cette dernière.
Je l’avais épousée sans amour, beaucoup pour complaire à mon père, qui, mourant, s’inquiétait de me laisser seul. J’aimais mon père tendrement; occupé par son agonie, je ne songeai, en ces tristes moments, qu’à lui rendre sa fin plus douce; et ainsi j’engageai ma vie sans savoir ce que pouvait être la vie. (I, 1, p. 598)
L’oiseau apparaît d’une manière significative lors de leur voyage de noce: « Par-dessus les murs, des palmiers. À notre approche, des tourterelles y volèrent » (I, 4 p. 615). En se promenant, Michel et Marceline entendent un « appel discret des tourterelles » (I, 4 p. 615). Que les tourterelles accompagnent les nouveaux mariés, cela n’est pas un fruit du hasard car il s’agit du symbole de la fidélité (Colin 2000, 519-520), valeur essentielle du mariage chrétien.
À la différence de l’oiseau, le cheval est lié à la mère, l’eau, et l’homosexualité. L’association entre le cheval et la mère se trouve dans le souvenir d’enfance de Michel: « Que je fus reconnaissant à ma mère de m’avoir conduit au manège durant ma première jeunesse » (II, 1 p.639). Une telle association s’observe également dans l’évocation du roi Athalaric qui se révolte contre sa génitrice et l’enfant terrible s’apparente à « un cheval entier [qui] fait un harnais gênant » (I, 9 p.630). Le rapport mère/enfant se double ainsi de celui cheval/homme. Dans son article « Cheval, mon beau miroir », où il s’applique à expliquer la valeur symbolique du cheval sous la lumière psychanalytique, Chefdhotel, en attirant notre attention sur le plaisir qu’on se procure de l’équitation, plaisir provoqué par le rythme du cheval qui galope et qui berce ainsi son cavalier, affirme: « il apparaît que la relation sujet/cheval a, à bon des égards, à voir avec la relation bébé/mère » (2009, 47).
Si l’oiseau incarne l’amour hétérosexuel, le cheval connote l’homosexualité. Le jeune roi Athalaric, ce cheval entier, goûte « une vie violente, voluptueuse et débridée » avec « de rudes favoris de son âge » (I, 9 p. 630). La bête assume le même symbolisme dans le rapport entre Michel et Charles, rapport érotiquement fortifié par les promenades à cheval répétés (II, 1). Contrairement au couple Michel- Marceline lié par le ciel, celui Michel-Charles est en outre lubrifié par l’eau car sur le cheval les corps des deux hommes mouillent: « nous gagnions la limite des bois; des coudres ruisselants, secoués au passage, nous trempaient » (II, 1 p. 640). Dans cette activité exclusivement virile, l’épouse de Michel est exclue: au dire de celui-ci, « je rentrais à La Morinière, au moment que Marceline se levait » (II, 1 p. 640). Comme le roi Athalaric, Michel connaît lui aussi la volupté auprès de son favori:
« Je rentrais ivre d’air, étourdi de vitesse, les membres engourdis un peu d’une voluptueuse lassitude, l’esprit plein de santé, d’appétit, de fraîcheur. Marceline approuvait, encourageait ma fantaisie. En rentrant, encore tout guêtré, j’apportais, vers le lit où elle s’attardait à m’attendre, une odeur de feuilles mouillées. » (II, 1 p. 640)
Propos dans lequel il est à remarquer d’une part l’épithète «voluptueuse » qui est également apparue dans la description du comportement d’Athalaric, ci-haut mentionnée, et d’autre part les «membres » qui, chez Michel, s’impliquent essentiellement dans l’acte homoérotique, lequel laisse dans l’odeur de « feuilles mouillées » la trace de la jouissance.
Le cheval a comme substitut l’anguille, animal aquatique. De même que le cheval, l’anguille, dont on a noté « l’évidence du symbole sexuel » (Dority et Ouellet 1969, 325), relie Michel et Charles dans une relation homoérotique lubrifiée. Cela s’observe dans l’épisode où Michel et Charles collaborent à attraper le poisson. Le début de l’activité est marqué par le déshabillement: Charles « ôta brusquement ses souliers, ses chaussettes, mit bas sa veste et son gilet, puis relevant très haut son pantalon et les manches de sa chemise. » (II, 1 p. 636); et Michel de dire « je l’imitai » (II, 1 p. 636). Ainsi que le cheval qui permet aux membres de Michel de goûter une voluptueuse lassitude, l’anguille, dont la nature phallique s’avère irréfutable, est à l’origine d’une union intime des mains des deux hommes, lesquels s’inondent dans la mare de sensualité.
« Je l’appelai bientôt pour m’aider à cerner une grosse anguille; nous unissons nos mains pour la saisir... Puis après celle-là, ce fut une autre; la vase nous éclaboussait au visage; parfois on enfonçait brusquement et l’eau nous montait jusqu’aux cuisses; nous fûmes bientôt tout trempés. » (II, 1 p.636)
L’eau réunissant les deux corps virils, l’intimité anéantit tout signe de distance, à commencer par le pronom vous « à la fin du jour, je m’aperçus que je tutoyais Charles, sans bien savoir quand j’avais commencé » (II, 1 p. 636). Et, bien évidemment, dans l’univers aquatique du cheval-anguille, la femme n’a pas sa place: « Marceline n’était pas encore venue et ne vint pas, mais déjà je ne regrettais plus son absence; il me semblait qu’elle eût un peu gêné notre joie » (II, 1 p. 636).
Le binaire oiseau/cheval révèle encore l’opposition entre la mort et la vie. Dans sa personnification, la mort est dotée d’ailes, s’apparentant ainsi à un oiseau: « L’important, c’est que la mort m’eût touché, comme l’on dit, de son aile. » (I, 2 p. 605); « Après que l’aile de la mort a touché, ce qui paraissait important ne l’est plus. » (I, 6 p. 622). Ainsi, tout ce qui est associé à l’oiseau, à savoir père et mariage, devient sujet au trépas. Le père de Michel est décédé et la vie sexuelle issue de ce père, c’est-à-dire le mariage entre Michel et Marceline, n’amène qu’à la mort: leur enfant n’a pu voir le jour à cause de la fausse couche; Marceline, elle aussi, rend son dernier souffle peu après l’incident.
L’amour hétérosexuel est fatal. Par contre, l’homosexualité, trait sémique propre au cheval (dans le cadre de notre analyse), contribue à la vie et à la renaissance. En se promenant dans un jardin public à Biskra, non seulement Michel connaît son penchant inédit, mais surtout il découvre une nouvelle vie:
« Je parlai de ma promenade et fis comprendre sans rudesse à Marceline pourquoi je préférais sortir seul.
[...] L’air était calme et tiède, mais je pris mon châle pourtant, comme prétexte à lier connaissance avec celui qui me le porterait. [...] Je me souviens d’un arbuste, dont l’écorce, de loin, me parut de consistance si bizarre que je dus me lever pour aller la palper. Je la touchai comme on caresse; j’y trouvais un ravissement. Je me souviens... Était-ce enfin ce matin-là que j’allais naître? » (I, 3 pp. 613-614)
Là se présente toujours le leitmotiv de l’inexistence de Marceline dans la vie homoérotique de Michel. En outre, la main, qui a saisi l’anguille, reprend ici son importance. En effet, à propos de l’« arbuste », dont la forme ne manque pas de rappeler l’anguille et qui paraît tellement irrésistible que le protagoniste est obligé de se lever afin de le toucher, Dority et Ouellet écrivent: « L’implication sexuelle de ce geste est évidente. À travers toute son œuvre Gide associe le tronc des arbres aux corps des jeunes garçons » (1969, 316). L’attouchement est vraisemblablement essentiel dans la vie sexuelle de Gide car on ne peut ignorer « le célèbre refus gidien de la sodomie » (Cusset 2002, 161). Quoi qu’il en soit, chez Michel, toucher ce qui évoque le corps des jeunes garçons lui permet de « naître ».
Le réseau symbolique poisson(comme substitut du cheval)-homosexualité-eau-mère-naissance réapparaît poétiquement dans le séjour de Michel à Ravello. Étant sur le point de se rétablir de sa maladie, ce dernier s’adonne à une activité: s’étant mis à nu, il se jette dans une source claire:
« j’avançai, résolu d’avance, jusqu’à l’eau plus claire que jamais, et, sans plus réfléchir, m’y plongeai d’un coup tout entier. Vite transi, je quittai l’eau, m’étendis sur l’herbe, au soleil. Là des menthes croissaient, odorantes; j’en cueillis, j’en froissai les feuilles, j’en frottai tout mon corps humide mais brûlant. Je me regardai longuement, sans plus de honte aucune, avec joie. Je me trouvais, non pas robuste encore, mais pouvant l’être, harmonieux, sensuel, presque beau. » (I, 6 p. 625)
En se plongeant dans l’eau, Michel agit telle une anguille. L’eau évoque la mère en rappelant le liquide amniotique et le fait de se tirer de l’eau (« je quitte l’eau ») signifie en psychanalyse la naissance (Freud 1986, 69), sans compter la nudité de Michel qui l’identifie à un nouveau-né. La limpidité de l’eau suggère par ailleurs un miroir et un reflet, de même que l’attitude de Michel qui se regarde et qui s’admire est celle d’un Narcisse. Or le narcissisme est étroitement lié à l’homosexualité car « homosexual love differs from heterosexual love in being narcissistic [...], since the object is loved on account of its similarity to what the subject is, once was, or hopes some time to become, as opposed to heterosexual love, which is anaclitic, being dependent on the object providing what the subject cannot himself be » (Rycroft 1995, 70). Donc, Michel qui admire sa propre beauté[2] n’est rien d’autre qu’un homme fasciné par sa propre sexualité, c’est-à-dire la masculinité. Et la joie du plaisir homosexuel va toujours de pair avec le corps devenu « humide ». En ce sens, des menthes odorantes anticipent l’odeur des feuilles mouillées, cueillies au cours de la promenade à cheval entreprise par Michel et Charles.
Lapin/Chien
Lapin/Chien présente un autre antagonisme. Le lapin et le chien s’opposent l’un à l’autre et les deux se contredisent respectivement à l’oiseau et au cheval. En d’autres termes lapin/chien est la négation de oiseau/cheval: la première opposition étant S1/S2, la seconde se révèle -S1/-S2.
De la sorte, tandis que l’oiseau connote air - bon père - rapport conjugal - mort, le lapin en constitue un contraste systématique en signifiant terre - mauvais père - inceste - non-mort. L’animal apparaît principalement dans la deuxième partie chapitre 3, lorsque Michel se livre au braconnage. L’incident se passant à La Morinière, le lapin (ou le lièvre, sa variante) se rattache pour ainsi dire à la terre.
Le lapin connote l’inceste. Le braconnage, en l’occurrence la chasse au lapin, auquel Michel prend plaisir n’est pas sans rapport avec l’inceste. Charles lui reproche: « Comment voulez-vous qu’on défende vos intérêts, quand vous les attaquez vous-même? Vous ne pouvez protéger à la fois le garde et le braconnier » (II, 3 p. 672). En effet, un propriétaire, qui chasse illégalement l’animal qu’il est censé protéger sur sa propre terre, s’apparente à un père qui, au lieu d’être tutélaire, harcèle lui-même son enfant sexuellement. À cet égard, ce n’est pas un hasard si sur la terre de La Morinière se trouve effectivement un père incestueux, à savoir Heurtevent, qui « couchait avec sa fille » (II, 3 p.666). Le nom de Heurtevent semble être composé du v. heurter + le vent. Or, comme nous l’avons vu, le vent, le ciel, est l’espace de Dieu. Ainsi, ce personnage, qui « heurte » le vent, s’oppose au bon père, se révèle un mauvais père, et il est à rappeler que l’inceste est défendu par le Père (Lévitique 18, 6-18). L’enfant et le lapin sont pareillement victimes du mauvais père: de même que Heurtevent couche avec sa fille, de même Michel attaque ses propres intérêts. Du reste, force est de constater que le plaisir que Michel se procure en braconnant pourrait être qualifié sinon de pervers, du moins de sexuel: « j’entends un très léger pas approcher. Mon cœur bat et j’apprends soudain l’affreuse volupté de celui qui braconne » (II, 3 p. 667); « j’eus l’amusement de trouver deux lapins pris aux pièges » (II, 3 p. 668).
Le lièvre incarne la fécondité animale et la sexualité déchaînée (Cazenave 1996, 363). Ce serait pour cette raison que le lapin a été choisi pour le logo Playboy. Le rapport conjugal, représenté par l’oiseau, n’amène à aucune vie. En contrepartie, on se reproduit en commettant l’inceste, que connote le lapin: chez Heurtevent, « la fille aînée a déjà deux enfants du père » (II, 3 p. 666). Nul n’ignore que Gide se révolte contre son milieu et se libère des contraintes de la morale et de la religion qui a opprimé son enfance (Chevalier 1993, 4). En créant Marceline, une mariée en proie à l’avortement, à côté d’une fille incestueuse mais fertile, notre auteur ne se serait-il pas moqué de la morale chrétienne qui a institué la procréation comme le but suprême de la sexualité (Genèse 1: 28), mais qui n’arrive pas à ce but avec la vie sexuelle qu’elle impose (la relation matrimoniale) alors que c’est l’inceste, rapport qu’elle a interdit et considéré comme tabou, qui y parvient bien mieux?
Le lapin nie tout ce que représente l’oiseau. En parallèle, le chien, tout en s’opposant au lapin, constitue un contraste par rapport au cheval. Contrairement à celui-ci qui s’associe à mère - eau - vie, celui-là représente prostituée(non-mère) - feu - non-vie.
Le chien connote d’abord le contraire de la mère: la prostituée. Le lien étroit entre l’animal et la prostitution s’explique par le fait que les jeunes que paie Michel en vue de son plaisir sexuel sont assimilés le plus souvent au chien: « L’enfant, que vous avez fait fuir en entrant, me l’apporte soir et matin, en échange de quelques sous et de caresses. Cet enfant qui, devant les étrangers, se fait sauvage, est avec moi tendre et fidèle comme un chien » (III, pp. 690-691). De même, Bachir, qui a « un mouvement de grâce animale et câline » et à qui Michel a donné « deux sous » après avoir vu « qu’il est tout nu sous sa mince gandourah blanche et sous son burnous rapiécé » (I, 2 p. 606), se révèle plus tard un être « fidèle et souple comme un chien » (I, 3 p.612). Il est curieux de constater que les prostitués de Michel sont tous arabes. Par contre, tout contact physique avec un Occidental, un Européen n’est jamais payant. Ainsi, Michel n’est obligé de payer aucun sou au cocher sicilien pour l’avoir embrassé (III, p. 682). Par ailleurs, l’arabité (on doit ce néologisme à Barthes [1982, 22]), semble étroitement liée au chien. À El Djem, on entend « des chiens » qui «hurlaient » (I, 1 p. 602). Narrateur, Michel se donne la peine de donner une épithète aux chiens de Biskra pour préciser leur nationalité: « Il était tard déjà; pas un bruit; pas un souffle; l’air même paraissait endormi. À peine, au loin, entendait-on les chiens arabes, qui, comme des chacals, glapissent tout le long de la nuit » (I, 5 p. 619). Les Arabes, ainsi que les chiens, exposent Michel aux vermines: à Kairouan, raconte-t-il, « je me souviens d’un groupe d’Arabes couchés en plein air sur les nattes d’un petit café. Je m’en fus dormir tout contre eux. Je revins couvert de vermine » (III, p. 684). Un Gide raciste? Certains y croient. Dans son étude postcolonialiste Culture et impérialisme, Edward W. Said, en commentant L’Immoraliste, confirme que ce roman participe pleinement du mépris occidental qui caractérise l’orientalisme (cité par Bridet 2019, 1). À en croire Said, Michel, et Gide derrière lui, se comporte avec les jeunes Arabes qu’il rencontre en Afrique du nord comme si les « indigènes » n’étaient que « d’éphémères menaces, et des occasions de faire preuve d’autorité » (cité par Bridet, Ibid.).
Ensuite, le cheval se lie à l’eau mais le chien s’associe au feu et ses avatars, chaleur, soleil. Chaque fois que Michel jouit à l’aide de la prostitution, il a chaud. Ayant vu les « pieds nus » de Rhada, la petite sœur de Bachir, et lui ayant payé « dix » sous[3], Michel est reparti « tout en sueur » (I, 3 p. 612). Pareillement, après avoir couché avec une fille publique, la maîtresse de Moktir, Michel retourne à son hôtel dans un climat brûlant: « Il souffle un sirocco aride; c’est un vent tout chargé de sable, et torride malgré la nuit » (III, p. 688).
Enfin, le chien nie la vie que représente le cheval: il est non-vie. Après la mort de Marceline, la vie sexuelle de Michel dépend exclusivement de la prostitution. Or, menant une telle existence, Michel sollicite ses amis: « donnez-moi des raisons d’être. Moi je ne sais plus en trouver » (III, p. 690). Il est impossible de traiter de vie un tel quotidien:
« Je me couche au milieu du jour pour tromper la longueur morne des journées et leur insupportable loisir.
J’ai là, voyez, des cailloux blancs que je laisse tremper à l’ombre, puis que je tiens longtemps dans le creux de ma main, jusqu’à ce qu’en soit épuisée la calmante fraîcheur acquise. Alors je recommence, alternant les cailloux, remettant à tremper ceux dont la froideur est tarie. Du temps s’y passe, et vient le soir... Arrachez-moi d’ici; je ne puis le faire moi- même. » (III, p.690)
Donc, à la différence de la mère qui engendre la vie, la prostituée, connotée par le chien, représente la neutralisation de l’existence.
La guerre des animaux
À propos du rapport entre la littérature, l’homme et l’animal, Calvet et Cruppi écrivent: « La littérature étudie l’homme, et elle étudie l’homme dans la nature. La nature c’est d’abord l’animal qui est fait à l’image de l’homme » (1956, 1). Effectivement, dans L’Immoraliste, les connotations des quatre animaux ici étudiés renvoient en fin de compte à quatre modes de vie sexuelle chez Michel. Ces quatre modes forment, nous venons de le voir, un réseau des relations différentielles existant entre les quatre bêtes qui les représentent respectivement. Le carré sémiotique de Greimas (Courtès 1976, 56-60) nous permet de récapituler le réseau en question.
Outre le jeu d’oppositions et de contradictions, les combinaisons font également sens. D’un côté, l’oiseau (S1) et le chien (-S2) partagent un trait commun que nous nommons différence car, dans ce roman, le mariage désigne le rapport entre des personnes de sexes différents alors que la prostitution relie un client et un(e) prostitué(e) de races différentes. À l’opposé, le cheval (S2) et le lapin (-S1) s’associent communément à l’identité, puisque l’homosexualité signifie le rapport entre des personnes de même sexe tandis que l’inceste dénomme une relation sexuelle entre des personnes partageant le même sang. D’un autre côté, l’oiseau (S1) et le cheval (S2), tout opposés qu’ils sont, détiennent un sème identique, à savoir l’humanité: tant qu’on sait naître et mourir, on reste humain. Par contre, une existence qui n’est ni la vie ni la mort (on pense par exemple à celle d’un vampire) est le contraire de l’humanité, c’est-à-dire l’inhumanité, qui résulte de la combinaison des deux signes de négation: le lapin (-S1) et le chien (-S2).
Il s’agit là de la structure paradigmatique des quatre animaux. En s’intéressant à leur relation syntaxique, on pourrait dire que dans la trame du récit, les quatre modes de vie sexuelle ne sont pas en mesure de coexister paisiblement: il y a toujours la guerre des animaux. Chez Michel, c’est d’abord l’oiseau qui domine, puis l’animal laisse sa place à son contraire, le cheval, lequel sera vaincu par sa négation, le lapin. Et, finalement, c’est la conquête du chien. Dans un tel dynamisme, il est à constater que, de l’oiseau au lapin, Michel passe progressivement de l’humanité à l’inhumanité.
Qu’on examine ici chaque étape de cette guerre des animaux[4].
L’oiseau bat le cheval
Le triomphe de l’oiseau sur le cheval se présente nettement dans cette séquence où une voiture, tirée par le cheval, a failli tuer Marceline:
« puis brusquement une voiture surgit, à l’allure désordonnée; c’était celle de Marceline. Le cocher chantait à tue-tête, faisait de grands gestes, se dressait debout sur son siège, fouettait férocement le cheval affolé. Quelle brute! Il passa devant moi qui n’eus que le temps de me ranger, n’arrêta pas à mon appel... Je m’élançai: mais la voiture allait trop vite. Je tremblais à la fois et d’en voir sauter brusquement Marceline, et de l’y voir rester; un sursaut du cheval pouvait la précipiter dans la mer. » (I, 8 p. 627)
Incarnant l’homosexualité, le cheval tente d’annihiler l’hétérosexualité représentée par Marceline, et l’animal tue en précipitant sa victime dans l’eau, en l’occurrence « la mer », élément qui lui est propre. Or à ce stade du récit, chez Michel, l’hétérosexualité reste encore dominante. Ainsi, il réussit à refouler son désir homoérotique, ce qui est suggéré par l’expression de l’agressivité virile: Michel bat le cocher, synecdoque du cheval:
« J’étais furieux contre cet homme; à sa première insulte je m’élançai et brutalement le jetai bas de son siège. Je roulai par terre avec lui, mais ne perdis pas l’avantage; il semblait étourdi par sa chute, et bientôt le fut plus encore par un coup de poing que je lui allongeai en plein visage quand je vis qu’il voulait me mordre. Pourtant je ne le lâchai point, pesant du genou sur sa poitrine et tâchant de maîtriser ses bras. Je regardais sa figure hideuse que mon poing venait d’enlaidir davantage. » (I, 8 pp. 627-628)
Viril, Michel donne un coup de poing alors que le cocher mord. Analysant Sarrasine, Barthes écrit à propos de l’opposition donner un coup de poing / mordre: « mordre, au lieu d’user du poing phallique, est un connotateur de féminité » (1970, 98).
Après la chute du cheval, l’oiseau s’envole triomphalement. Michel ayant ligoté le cocher enragé, l’amour conjugal s’épanouit: « Ah! quels regards après, et quels baisers nous échangeâmes » (I, 8 p. 628). Et suite au poing phallique, la virilité de Michel se complète lorsque ce dernier déclare : « Ce fut cette nuit-là que je possédai Marceline » (I, 8 p. 628).
Le cheval bat l’oiseau
Néanmoins, chez Michel, la victoire de l’oiseau-hétérosexualité n’est qu’éphémère. La reconnaissance du penchant homosexuel va poétiquement de pair avec un traitement plus amical envers le cheval. Dans la deuxième partie du roman où l’homosexualité de Michel s’affirme de plus en plus, on observe ces gestes de Charles apprivoisant un poulain: « Charles, au centre du cercle, évitant à chaque tour la corde d’un saut brusque, l’excitait ou le calmait de la parole; il tenait à la main un grand fouet, mais je ne le vis pas s’en servir » (II, 1 p. 639). Que le jeune homme ne se serve pas du fouet, le fait est à comparer avec le cocher qui a failli tuer Marceline et qui «fouettait férocement le cheval » (I, 8 p. 627): le refoulement du désir homosexuel est connoté par la maîtrise brutale du cheval, contrairement à la libération du même désir, laquelle est suggérée par l’abandon du fouet-refoulement.
Quand le cheval s’impose, c’est l’oiseau qui s’éclipse. Sans compter le fait que désormais Marceline n’aura plus de place dans la vie sexuelle de Michel, la défaite de l’amour conjugal hétérosexuel se traduit symboliquement dans l’image de la volaille enfermée: « Les canards, sur l’eau des douves, battaient de l’aile; ils s’agitaient sauvagement; on les voyait parfois se soulever, faire avec de grands cris, dans un vol tapageur, tout le tour de La Morinière. Un matin nous ne les vîmes plus; Bocage les avait enfermés » (II, 1 p. 643).
Le lapin bat le cheval
Puis, Michel s’adonne à l’activité assimilée à l’inceste, qui consiste à chasser illégalement les lapins. Obsédé par le lapin, notre protagoniste fréquente de moins en moins Charles et, par voie de conséquence, il quitte le cheval, emblème de la relation homoérotique entre les deux hommes: « je ne montais plus à cheval » (II, 3 p. 662).
Attiré par le braconnage, Michel ne dort plus la nuit: « je prenais en horreur mon lit, et j’eusse préféré la grange » (II, 3 p. 670). Or, à en croire Freud, le fait de dormir relève de la simulation de la vie intra utérine par excellence (1969, 74-75). En quittant son « lit », Michel abandonne donc la mère-cheval pour rejoindre « la grange », intimement liée à la terre, élément du mauvais père-lapin.
Le chien bat le lapin +le cheval +l’oiseau
C’est le chien qui se révèle le conquérant ultime. La situation finale du récit laisse supposer que la vie sexuelle de Michel ne tient dorénavant qu’à l’objet livré à la prostitution.
Michel déclare la chute du lapin: « ce soir je n’ai pas grand désir de braconner » (II, 3 p. 671). Dans la séquence où Michel couche avec la maîtresse de Moktir, on trouve dans la chambre de celle-ci un lapin; or, à la différence des lièvres qu’on chasse sur la terre sauvage de La Morinière, il s’agit ici du lapin bien dompté, confiné dans le lieu de la prostitution, ce qui connote la victoire du chien sur le lapin: « Nous entrons tous les trois dans l’étroite et profonde chambre où l’unique meuble est un lit... Un lit très bas, sur lequel on s’assied. Un lapin blanc, enfermé dans la chambre, s’effarouche d’abord puis s’apprivoise et vient manger dans la main de Moktir » (III, p. 688).
Le chien l’emporte de même sur le cheval. À la fin du récit, Michel choisit le désert au détriment de l’oasis, en d’autres termes, l’eau- cheval cède la place au le feu-chien: « À l’oasis je préfère à présent le désert... ce pays de mortelle gloire et d’intolérable splendeur. L’effort de l’homme y paraît laid et misérable. Maintenant toute autre terre m’ennuie. » (III, 687). Aussi Michel vend-il la terre de La Morinière, où il faisait la promenade à cheval avec Charles, pour s’installer désormais dans un pays brûlant qui s’apparente au désert: «La maison de Michel la domine, ainsi que le village dont elle n’est distante que peu. Par la chaleur, et toutes les moissons fauchées, cette plaine ressemble au désert » (À Monsieur D.R., p. 595).
Le chien triomphe enfin de l’oiseau. Le soleil des pays de la prostitution tue en quelque sorte l’épouse légitime: À Kairouan, Michel confesse « La chaleur moite de la côte affaiblissait beaucoup Marceline » (III, p. 684). En effet, curieux est le fait que Marceline meurt précisément après que Michel a couché avec la maîtresse de Moktir (III, pp. 688-689). Que la femme, chrétiennement mariée, laisse la croix tomber de sa main: « Contre le lit, quelque chose de dur sous mon pied: je me baisse, et ramasse le petit chapelet qu’elle réclamait naguère à Paris, et qu’elle a laissé tomber; je le passe à sa main ouverte, mais sa main aussitôt s’abaisse et le laisse tomber de nouveau. » (III, 689), cela marque la défaite absolue du Père-oiseau face à la mauvaise mère(prostituée)-chien.
Dans cet itinéraire de sensualité qui amène Michel de l’oiseau au chien, qui commence par le rapport conjugal et finit par la prostitution en passant par l’homosexualité et l’inceste, l’humanité chez le protagoniste s’efface progressivement pour laisser la place à l’inhumanité. Un de ses amis note ainsi sa transformation radicale: «Michel est dévoué: il l’est encore; il ne le sera bientôt plus qu’à lui- même. » (À Monsieur D.R., p. 593); « Ce n’était plus le puritain très docte de naguère, aux gestes maladroits à force d’être convaincus, aux regards si clairs que devant eux souvent nos trop libres propos s’arrêtèrent. C’était... » (À Monsieur D.R., p. 594). La fin du roman montre un Michel, qui caresse le petit Ali en échange de quelques sous, qui couche avec la sœur de celui-ci laquelle « vend son corps » (III, p. 691), et chez qui aucun signe d’humanité ne se détecte:
« Il avait achevé ce récit sans un tremblement dans la voix, sans qu’une inflexion ni qu’un geste témoignât qu’une émotion quelconque le troublât, soit qu’il mît un cynique orgueil à ne pas nous paraître ému, soit qu’il craignît, par une sorte de pudeur, de provoquer notre émotion par ses larmes, soit enfin qu’il ne fût pas ému. Je ne distingue pas en lui, même à présent, la part d’orgueil, de force, de sécheresse ou de pudeur. » (III, p.690)
Conclusion
Gide est l’un de ces écrivains pour qui le symbolisme prend une place primordiale dans leurs œuvres. Notre auteur note:
« En étudiant la question de la raison d’être de l’œuvre d’art, on arrive à trouver que cette raison suffisante, ce symbole de l’œuvre, c’est sa composition.
Une œuvre bien composée est nécessairement symbolique. Autour de quoi viendraient se grouper les parties? qui guideraient leur ordonnance? sinon l’idée de l’œuvre, qui fait cette ordonnance symbolique.
L’œuvre d’art, c’est une idée qu’on exagère.
Le symbole, c’est autour de quoi se compose un livre.
La phrase est une excroissance de l’idée. » (1996, 258)
Une telle conception se concrétise avec succès dans L’Immoraliste car, comme le remarque un critique, ce roman présente un symbolisme interne, par lequel on entend « l’ensemble des rapports analogiques de correspondance interne que les différentes parties ou détails du roman ont soit entre eux, soit avec l’ensemble, indépendamment de tout lien rationnel de causalité » (Maillet 1972, 41).
Notre étude permet d’affirmer que L’Immoraliste est une œuvre bien composée au sens gidien. Loin d’être divergents et insignifiants, oiseau, cheval, lapin et chien forment un système de valeurs différentielles et génèrent des rapports analogiques de correspondance. Notamment, ce symbolisme interne relève d’un noyau autour duquel gravite l’idée de l’œuvre: c’est au moyen des valeurs symboliques des quatre animaux que s’expriment artistiquement le dynamisme dans la vie érotique d’un personnage ainsi que sa conversion en un inhumain, c’est-à-dire un immoraliste.
References:
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Gide, André. 2009. Romans et Récits, Œuvres lyriques et dramatiques I. Bibliothèque de la Pléiade. Édition publiée sous la direction de Pierre Masson avec, pour ce volume, la collaboration de Jean Claude, Alain Goulet, David H. Walker et Jean-Michel Wittmann. Paris: Gallimard.
Maillet, Henri. 1972. L’Immoraliste d’André Gide. Coll. Lire aujourd’hui. Paris: Hachette.
Rycroft, Charles. 1995. A Critical Dictionary of Psychoanalysis (2nd edition). London: Penguin Books.
[1] Nous nous référons à André Gide, Romans et récits, Œuvres lyriques et dramatiques. Paris: Gallimard, 2009. Nous indiquons en chiffre romain la partie et en chiffre arabe le chapitre, les deux chiffres suivis du numéro de la page.
[2] À en croire Barthes, « dire d’un garçon qu’il est beau suffit déjà à le féminiser » (1970, 44).
[3] Il nous paraît tentant de confronter cet épisode avec celui où Michel paie deux sous à Bachir, que nous avons déjà cité (I, 2 p. 606): le rapprochement des deux incidents s’explique par le fait que Michel, voyeur, paie un(e) jeune pour avoir vu sa nudité.
[4] Le concept d’une telle analyse, nous le devons à Umberto Eco (1993), qui a su trouver dans la série romanesque de James Bond « les situations de jeu et l’intrigue comme ‘partie’».